Votre assiette santé pour un moral au top toute l'année !


Le rythme de notre corps suit celui des saison. Il est donc parfaitement normal d'avoir moins d'énergie en novembre ou décembre, ce qui peut se traduire par un moral plus bas. Toutefois, il est important de différencier les évolutions naturelles de nos rythmes et les perturbations qui peuvent devenir de véritables problèmes de santé.

 

Dans le cas de ce qu'on appelle "déprimes saisonnières", on peut se stimuler par des activités agréables, des boissons chaudes, de l'activité physique, du cocooning. Chez certaines personnes, la lumière sera très importante : il a tété démontré dans une méta-analyse que la luminothérapie était efficace dans le traitement de toutes les formes de dépressions, saisonnières ou non. La stimulation de la glande pinéale permet de resynchroniser des rythmes circadiens déréglés par des phénomènes comme le changement d'heure par exemple. Les médecins réclament d'ailleurs la suppression du changement d'heure depuis des décennies, demande qui semblait avoir été entendue par l'Union européenne, mais malheureusement retardée par la pandémie de Covid-19.


La recette secrète de l'immunité et de la santé mentale

La base d'un moral solide repose avant tout sur une alimentation propice à la bonne santé mentale. Dans l'imaginaire collectif, l'esprit est encore séparé du corps comme à l'époque de Descartes. Or l'alimentation va influencer le microbiote intestinal, ce paquet de bactéries qui tapisse notre intestin grêle et notre côlon et qui nous aide à digérer les aliments de même qu'à renforcer notre système immunitaire. Les chercheurs en santé mentale ont découvert dans les années 1990 les liens étroits entre l'immunité et la dépression. Les personnes stressées/ou dépressives sont plus à risques d'infections, et les personnes  l'immunité fragile sont également plus vulnérables à l'anxiété et à la dépression.

 

La pandémie de Covid-19 a renforcé l'intérêt de la population et des décideurs pour les questions d'immunité et de santé mentale. 

 

Notre alimentation doit apporter à notre corps des calories et des nutriments. Jusqu'à la génération de nos grands-parents, elle remplissait cette fonction puisqu'ils mangeaient essentiellement local et de saison, avec peu de viande et de poisson, et beaucoup de fruits, légumes et de légumineuses. En 2020, plusieurs méta-analyses confirment que la consommation de fruits et de légumes diminue le risque de faire une dépression. Ces données scientifiques ont été un véritable bouleversement conceptuel. Oui, on peut prévenir une maladie mentale par ce qu'on met dans son assiette ! Il n'y a pas de de légume ou de fruit "star". Local et de saison est le maître-mot. En hiver, les agrumes sont donc de mise, les clémentines par exemple, et un verre de citron pressé le matin au réveil.


Oubliez votre balance, regardez votre miroir

En hiver, la plupart d'entre nous sommes davantage tentés par les produits sucrés, salés ou riches en lipides. C'est parfaitement normal dans la mesure où, d'une part, nous dépensons souvent plus de calories pour maintenir notre température corporelle, et d'autre part notre corps en mode "hibernation" peut avoir tendance à vouloir stocker plus "pour passer l'hiver". Nous ne sommes génétiquement pas tous égaux face à la prise de poids. Toutefois il est important de noter qu'une prise de poids excessive sous forme de graisse autour des viscères (ce que les anglophones appellent la "sugar belly", la ceinture de sucre) entraîne une inflammation permanente et à bas bruit dans le sang. Il est donc important de regarder la silhouette de son corps que le poids sur la balance. De plus, lorsqu'on fait du sport, la synthèse de muscle peut maintenir un certain poids tout en améliorant l'inflammation. Le métabolisme de base (ce que l'on consomme sans faire d'activité physique) est fortement influencé par la masse musculaire. Oubliez donc la balance et regardez votre corps.

 

Il a été démontré que l'inflammation dite de bas grade (à bas bruit) augmentait les symptômes de dépression. L'inflammation peut être mesurée par votre médecin grâce à un dosage de la vitamine-C-réactive ultrasensible. Des concentrations plus élevées de cette protéines de l'inflammation ont été associées de manière robuste à un risque accru de présenter des changements d'appétit, une sensation que tout est un effort, une perte d'énergie, des problèmes de sommeil et le manque d'intérêt pour faire des choses. Perdre de la graisse peut donc améliorer l'inflammation. Attention toutefois à maintenir sa masse musculaire par un exercice physique régulier comme par exemple la marche nordique, le vélo ou l'aquagym. Les activités de groupe ont l'avantage de renforcer la motivation tout en maintenant le lien social, indispensable à notre moral. Attention également à ne pas se dénutrir et à maintenir une bonne consommation de fruits et de légumes, en réservant les fruits les plus caloriques comme la banane aux journées d'effort.


Du poisson gras pour les omégas-3

Les omégas-3 (en particulier l'acide eicosapentaénoïque/EPA) ont également une activité anti-inflammatoire. Ce sont d'ailleurs les compléments alimentaires qui ont montré la meilleure efficacité à ce jour en santé mentale, avec des dizaines d'études et de et de méta-analyses qui concluent à leur efficacité. Aujourd'hui, toute personne qui présente des symptômes dépressifs ou anxieux devrait se supplémenter en oméga-3, même si les oméga-3 ne peuvent bien sûr pas traiter toutes les formes de dépression. Il a été démontré dans une méta-analyse récente que leur action était synergique avec celle des antidépresseurs pour les dépressions les plus sévères. Les oméga-3 sont des fluidifiants pour les membranes des neurones, ils améliorent le fonctionnement de notre cerveau et des neurotransmetteurs impliqués dans la dépression, comme la sérotonine, la noradrénaline, la dopamine, le glutamate, le GABA et les endocannabinoïdes. L'efficacité des oméga-3 dans le traitement de la dépression est aujourd'hui parfaitement établie.

 

Il est très difficile d'atteindre l'apport recommandé de 2 g par jour d'oméga-3 dans l'alimentation, sachant que la moyenne des Français en bonne santé ne consomme que 600 mg/j. Les oméga-3 de type EPA et DHA (directement utilisables par notre corps) se trouvent essentiellement dans les poissons gras, qui d'une part coûtent de plus en plus cher dans un contexte de surpêche et d'autre part exposent au risque d'intoxication aux métaux lourds s'ils sont consommés plus d'une fois par semaine. De plus, les poissons surgelés ne contiennent plus d'oméga-3 après six mois de congélation, il faut donc bien regarder les dates. A l'inverse, les sardines en boîte conservent bien les oméga-3. On trouve des oméga-3 également dans les végétaux (huile de lin et de colza notamment), mais leur taux de conversion dans l'organisme est inconnu et variable d'une personne à l'autre. Ces aliments apportent également des graisses saturées, il faut donc faire attention à la quantité consommée. Quelques noix, amandes et noisettes chaque jour sont recommandées pour leurs apports nutritifs (une demi-douzaine de chaque maximum).


Misez sur l'alimentation anti-inflammatoire et la vitamine d

Certaines épices ont une activité anti-inflammatoire, comme l'ail, le gingembre et le curcuma (associé au poivre pour permettre son absorption). Elles peuvent remplacer avantageusement le sel de table, souvent consommé en trop grande quantité. Le curcuma est également riche en fer, comme le thym, le basilic, les herbes de Provence, le laurier et le persil. Le basilic, la menthe, les graines de lin, les noix du Brésil, le sésame, les graines de chia sont riches en magnésium.

 

La vitamine D est également un modulateur immuno- inflammatoire. Une étude publiée dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH, une revue de référence pour l'épidémiologie française) a montré il y a quelques années que plus de 80% des Français présentaient des insuffisances en vitamine D, surtout l'hiver puisque la vitamine D est synthétisée en partie par la peau lors de l'exposition au soleil. Comme pour les oméga-3, il est difficile d'atteindre les apports recommandés de vitamine D dans l'alimentation. Les poissons gras (et leur huile) et le jaune d'œuf sont les aliments les plus riches en vitamine D qui se stocke dans les graisses. La consommation de poissons gras recommandée est toutefois d'une portion par semaine pour limiter les risques liés à l'absorption de mercure, c'est donc le même facteur limitant que pour l'apport d'oméga-3.


Soigner son ventre pour soigner sa tête

Le rôle de la sérotonine, qui avait été fortement mis en avant dans les années 1990 avec l'arrivée du Prozac et du Zoloft, est d'ailleurs remis en question, et de nouvelles études suggèrent que l'administration de probiotiques pourrait augmenter les endocannabinoïdes, des molécules actives dans les aires du cerveau traitant les émotions et le plaisir.

 

Le microbiote reste relativement stable au cours de la vie, puis il commence à décliner à partir d'environ 60 ans avec une diminution de la quantité de bactéries (et parfois de leur qualité, en fonction du mode de vie et notamment de l'alimentation). C'est pourquoi la piste des probiotiques est particulièrement intéressante chez les seniors. Les probiotiques sont des bactéries vivantes administrées sous forme de capsules dans le but d'avoir un effet positif sur la santé. Ils sont à distinguer des post-biotiques qui sont des bactéries inactivées ou des morceaux de bactéries. Nous savons d'ores et déjà que l'administration de probiotiques est efficace pour améliorer la dépression et l'anxiété avec un effet léger à modéré chez les adultes, qu'ils présentent un trouble mental caractérisé ou non. Cela a été répliqué dans plusieurs méta-analyses.

 

Nous manquons toutefois d'études chez les seniors, alors que tout semble indiquer que les probiotiques pourraient être particulièrement bénéfiques dans cette partie de la population. L'intérêt des post-biotiques n'est pas clairement établi, car la plupart des études ont été conduites avec des probiotiques. L'intérêt de la consommation de probiotiques alimentaires (sous forme de yaourts par exemple ou de choucroute) n'est également pas clairement établi, car l'acidité de l'estomac détruit une grande partie des bactéries (c'est d'ailleurs sa principale fonction). Toutefois, cela n'a pas été clairement quantifié et la consommation de yaourts semble globalement plutôt conseillée pour la santé, au moins pour ses apports en protéines. Attention à privilégier des yaourts nature, car la plupart des yaourts aromatisés ou aux fruits contiennent des sucres et des additifs qui peuvent être parfois nocifs pour la santé s'ils sont consommés sur le long terme.


Ces bactéries qui influent sur votre cerveau

Comment les bactéries de notre intestin peuvent-elles influencer notre cerveau ?

 

Quatre voies principales ont été identifiées.

  • La voie sanguine : l'intestin est imperméable en conditions normales et peut devenir perméable s'il est soumis à une alimentation inflammatoire prolongée. Il laisse alors passer des agents inflammatoires dans le sang.
  • La voie du système immunitaire. Les bactéries modulent et renforcent le système immunitaire. Si le microbiote est perturbé, une réaction inflammatoire locale va mobiliser le système immunitaire (dont 70% est consacré à la protection vis-à-vis des agents infectieux intestinaux)
  • La voie des nutriments et des acides aminés qui vont être absorbés à l'aide du microbiote. Le tryptophane est un acide aminé précurseur de la sérotonine tandis que la tyrosine est précurseur de la noradrénaline et de la dopamine. La vitamine B9 (également appelée folate) est une coenzyme nécessaire à la synthèse de neurotransmetteurs. Une méta-analyse a montré que la supplémentation en folate pouvait améliorer la dépression. La vitamine B9 se trouve se trouve dans les légumes à feuilles, mais elle est détruite par la cuisson.
  • La voie du nerf vague, qui relie l'intestin aux circuits émotionnels du cerveau.

En mettant en place une supplémentation adaptée et en adoptant une alimentation équilibrée, vous améliorerez votre santé en limitant l'impact saisonnier sur votre moral. Bonne fin d'hiver !



Mon assiette type pour un moral au top !

Pour garder le moral même en hiver malgré le froid et les jours de plus en plus courts, de la choucroute, des noix en tout genre (non grillées non salées), des oeufs, des yaourts nature, du pain complet, des salades, des potages, du citron, du café noir ou du thé vert sans excès, de l'ail, des herbes constituent une bonne base pour un corps et un cerveau en fonctionnement optimal. La supplémentation en oméga-3 (EPA 1g/j, DHA 400 mg/j) et en vitamine D est fréquemment recommandée en cas de santé fragile (tendance au stress, anxiété et dépression, vulnérabilité aux infections).


Le meilleur fruit pour votre cerveau... lui ressemble !

A bien y regarder, les noix évoquent étrangement la forme du cerveau humain. Et bien ! leur consommation régulière pourrait prévenir le déclin cognitif et même la maladie d'Alzheimer. La nature est bien faite ! C'est d'ailleurs confirmé par des chercheurs chinois qui ont étudié près de 9 000 seniors et ont constaté ce lien. Pendant six ans, les participants ont estimé leur consommation (ou non) de noix au quotidien et ont répondu à plusieurs questionnaires pour mesurer leur déclin cérébral. Ceux qui mangeaient au moins 70 g de noix (une petite poignée de cerneaux) par semaine présentaient 17% de risques en moins de voir leurs performances cérébrales défaillir. Un résultat qui n'a pas été observé chez les participants qui ne mangeaient pas de noix (au moins 70 g). Plusieurs mécanismes pourraient être à l'origine de ces conclusions, à commencer par la richesse en acides gras insaturés des noix. Ces derniers auraient un effet neuroprotecteur, réduiraient l'inflammation et influenceraient même sur la sensibilité à l'insuline, autant de facteurs déterminants face au déclin cognitif.


Ce poison qui crée l'inflammation et la dépression

Il faut abandonner l'idée que le sucre est bon pour le cerveau sous prétexte que celui-ci consomme essentiellement du glucose. Le cerveau peut utiliser l'énergie des corps cétogènes en cas de manque de sucre, c'est d'ailleurs ce qui se passe chez les enfants épileptiques à qui l'on prescrit ce mode d'alimentation sans sucre également nommé "cétogène". On parle de muscler son mental, mais le cerveau n'est pas un muscle et ne remplace le fait de bouger. Pour se maintenir en forme, on peut par exemple instaurer des marches lors des réunions familiales, plutôt que de longues après-midis digestives confinées qui favoriseront également la transmission des microbes entre générations.

 

Evidemment, le sucre dans le café et le thé est à proscrire, car il est absorbé et stocké très rapidement. En cas de besoin d'édulcorants, le sucralose est préférable à l'aspartame et à l'acésulfane-k qui ont été associés à un risque augmenté de cancer dans une étude issue de la cohorte Nutrinet publiée en mars 2022. Le mieux est d'éviter autant que possible les sucrettes et autres additifs pour rééduquer son palais.

 

Concernant le pain, les pâtes et le riz, les aliments complets sont préférables aux aliments ou farines blancs/raffinés pour ralentir la digestion. Concernant les compotes de pommes, elles peuvent être choisies "sans sucre ajouté" et utilement mélangées à de la levure de bière, riche en protéines et nutriments. Les agrumes apporteront la vitamine C et d'autres nutriments utiles, à condition de les consommer dès l'extraction, car la vitamine C s'oxyde au contact de l'air (un jus pressé perdra sa vitamine C au bout de vingt minutes).


Aurélie Brunet, Naturopathe-Nutritionniste à Aix-les-Bains (73)

Le 24 février 2023