INTRODUCTION
Actuellement, on en connaît très peu sur les champignons. Néanmoins, jour après jour, nous leur découvrons de surprenantes propriétés. Ces organismes n'appartiennent à aucun des deux règnes animal et végétal mais cependant, en réunissent les caractéristiques les plus intéressantes.
Celui que nous dénommons champignon et qui pousse à l'automne dans nos forêts est la partie "florale" d'un organisme beaucoup plus grand qui se développe normalement sous terre. De fait, le vrai champignon est dénommé "mycélium" et est composé d'un enchevêtrement d'"hyphes". Ces filaments organiques se développent à partir de spores qui "fructifient" à certaines époques de l'année. Cette fructification donne le corps du champignon qui produit des spores ou "graines" pour continuer le processus de reproduction. Sous ce rapport, les champignons sont semblables aux plantes : ils peuvent étendre leurs racines sous terre (mycélium) ou disperser leurs embryons ou graines à l'extérieur (champignon). On peut voir une similitude curieuse entre les plantes et les champignons par exemple la pomme étant le champignon et le pommier le mycélium.
L'industrie pharmaceutique étudie les champignons pour obtenir des informations sur leurs composés actifs, c'est à dire les molécules spécifiques pour combattre une maladie particulière. Après l'extraction, l'isolement et les essais pour tester leur efficacité, cette industrie cherche la manière la plus rentable de les produire en masse et de les mettre sur le marché (après l'obtention du brevet protégeant le procédé de production et des études qui démontrent l'efficacité thérapeutique du produit).
En mycothérapie, ce qui est étudié est du champignon possédant la totalité de ses principes actifs. Ceci est probablement dû à deux raisons :
La plupart des extraits présents sur le marché ont été élaborés à partir de la culture du mycélium au lieu du champignon. Il n'y a pratiquement pas de différences entre le champignon et le mycélium concernant leur teneur en principes actifs et aussi au niveau hormonal ou enzymatique. La reproduction du champignon peut-être réalisée à travers le carpophore (le champignon aérien qui n'est qu'une fructification du mycélium), le mycélium ou par reproduction sexuelle. Même si le champignon présente une vitesse et force de croissance stupéfiante (il est capable de lever ou perforer des dalles), le mycélium est développé aussi d'une manière énergétique et rapide.
Désormais, l'élaboration de l'extrait est totalement différente. Le mycélium est composé de fines et fragiles hyphes mélangées avec le milieu de culture, généralement des farines de céréale humectées. Il est très difficile de séparer le mycélium de la matrice céréale à ce point. Il existe deux possibilités : réaliser une séparation approximative, dénommée "poudre de mycélium" (toujours mélangée avec une fraction notable de céréales) ou bien prendre la totalité, dénommée "biomasse de mycélium" où la fraction significative et thérapeutique ne dépasse pas 30% du total.
Dans le cas d'utilisation du champignon (le carpophore), nous avons la garantie de la pureté du champignon et qu'il ne contient aucune matrice inerte.
La seule exception est le Cordyceps sinensis étant un champignon entomopathogène dont la culture du mycélium est la seule possibilité.
Il est nécessaire de clarifier la différence entre la valeur nutritive du champignon et le contenu de ses composés actifs d'action thérapeutique concentrés dans ses extraits. Evidement, les extraits utilisés pour le traitement des maladies ne contiennent que de "principes actifs", c'est à dire, la molécule, ou les molécules qui ont démontré être utiles pour combattre des pathologies particulières ou favoriser ou réguler le système immunitaire, ...
En Médecine traditionnelle Chinoise (MTC), les champignons médicinaux sont consommés sous forme de décoctions permettant l'extraction de leurs "principes actifs" solubles dans l'eau. Néanmoins, ils sont aussi ingérés en soupes, une manière plus efficace puisqu'elles comprennent aussi les principes actifs solubles en lipides.
La plupart des champignons médicinaux sont comestibles (le Reishi est l'une des exceptions les plus connues) et très appréciés pour leurs vertus organoleptiques. Cependant, indépendamment des saveurs et des odeurs, les champignons sont des nutriments de grande valeur. La totalité des champignons a une haute teneur en protéines végétales de qualité, dont tous les acides aminés essentiels, fibres, vitamines, minéraux et enzymes et relativement pauvre en sucres simples et graisses saines. Juste pour ces raisons, cet aliment devrait être inclus dans le régime quotidien.
Par contre, la valeur thérapeutique des champignons ne réside pas seulement dans leurs composants nutritifs, mais aussi par leur teneur en molécules réalisant une fonction thérapeutique spécifique. Parmi la grande variété de molécules thérapeutiques des champignons médicinaux, il faut remarquer les principes actifs suivants.
Les molécules les plus fréquentes et présentes dans presque tous les champignons médicinaux sont :
Bêta-glucanes : ce sont des longues chaînes de polysaccharides, c'est à dire, des grandes molécules composées de monosaccharides (glucose) reliés par des liaisons glycosidiques. Les chaînes de monosaccharides sont organisées dans une triple hélice dextrogyre et présentent des ramifications qui, certaines fois, portent aussi des protéines. Actuellement, on sait que les propriétés thérapeutiques des bêta-glucanes sont plus liées aux ramifications latérales qu'à la chaîne principale. Il existe différents types de bêta-glucanes, mais les plus importants et les plus étudiés sont les dénommés bêta-glucanes 1,3.
Glycoprotéines ou protéoglycanes : ce sont des chaînes linéaires de protéines (peptides) auxquelles des chaînes latérales de bêta-glucanes sont liées. Normalement, elles présentent une fonction immunomodulatrice ou antitumorale plus puissante que celle des bêta-glucanes. Leur action est liée au fait ces protéoglycanes provoquent une augmentation du nombre et de l'activité des macrophages, des neutrophiles, de cellules NK et de certains lymphocytes T et, en même temps, ils favorisent la sécrétion des cytokines spécifiques (activité cytotoxique).
Il a été découvert que les bêta-glucanes et les protéoglycanes possèdent la propriété de se lier au récepteur de complément 3 de la membrane des cellules du système immunitaire. Cette propriété fait qu'ils sont considérés par le système immunitaire humain comme des antigènes, ce qui entraîne une réponse de la part du système immunitaire et leur activation postérieure. Une autre propriété des protéoglycanes est qu'ils sont sont capables d'empêcher une réaction exagérée du système immunitaire à travers la régulation pour éviter une réaction auto-immunitaire.
Pour nous en rendre compte, on peut dire que les bêta-glucanes et les protéoglycanes des champignons sont des grandes molécules semblables à celles des membranes des bactéries. Ils "trompent" le système immunitaire pour qu'il interprète qu'il s'agit de pathogènes, mais en réalité, ils sont inoffensifs. Le système immunitaire déclenche une réponse consistant en l'augmentation de l'activité des macrophages, des cellules NK et des lymphocytes T.
La médecine intégrative affirme que les bêta-glucanes font partie intégrante de l'évolution de l'être humain et qu'ils sont fondamentaux pour le maintien de l'activité du système immunitaire. Les bêta-glucanes font partie des parois cellulaires des plantes, mais en raison de l'industrialisation croissante de l'alimentation, l'ingestion de cellules végétales (fibre) a diminué. De plus, l'utilisation des engrais réduit la teneur en bêta-glucanes 1,3 des céréales. Cette déficience du nombre de molécules de bêta-glucanes consommés dans le régime normal affecte notre système immunitaire ce qui le rend plus faible et moins actif.
Triterpènes : ce sont des molécules d'hydrocarbures typiques des plantes (huiles essentielles aromatiques) qui sont aussi présentes dans le tissu animal. Tout comme les bêta-glucanes et les protéoglycanes, les triterpènes sont les molécules les plus intéressantes et d'action plus variés des champignons médicinaux. Les propriétés qui leur sont attribuées sont les suivantes : capacité antivirale, hypotensive, hepatoprotective, anti-histaminique, anti-agrégante plaquettaire, anti-cholestérol et d'autres.
Stérols : il s'agit d'un type de graisse. Il faut souligner spécialement l'ergostérol (provitamine D) d'action antivirale et antitumorale.
Lectines : il s'agit d'une protéine qui est liée sporadiquement et temporellement aux glucides. Certaines lectines possèdent la propriété d'agglutiner les cellules tumorales pour bloquer leur prolifération.
Enzymes : elles sont présentes dans un grand nombre de champignons; la plupart d'entre elles ont des activités significatives bénéfiques pour la santé. On peut distinguer trois types d'enzymes contenues dans les champignons :
En dehors de ce type de molécules, les champignons médicinaux contiennent de nombreuses autres substances thérapeutiques et spécifiques à chaque espèce comme les statines, l'éritadénine, l'ergotioneina, le facteur NGF et d'autres auxquelles je ferai référence dans un prochain article lors de la description des composants actifs de chaque champignon.
Les bêta-glucanes sont les molécules bioactives les plus importantes contenues dans les champignons médicinaux. Ces substances, appartenant au groupe des polysaccharides, aident à réguler le système immunitaire et sont essentielles pour le développement normal des fonctions vitales.
Comme ils sont résistants au milieu acide de l'estomac, ils sont capables d'atteindre l'intestin sans subir de changements. Néanmoins, leur grand poids moléculaire et leur structure rigide entravent leur absorption. En vue d'améliorer la biodisponibilité des bêta-glucanes, il est recommandé la prise de substances qui aident à leur solubilisation.
Au niveau intestinal, la combinaison de bicarbonate et de vitamine C provoque un processus d'osmose inverse, ce qui implique une libération majeure d'eau et par conséquent, une augmentation de la viscosité et de la solubilité des bêta-glucanes. par ailleurs, grâce à l'eau, ces molécules sont sont capables de plier leur structure rigide et de favoriser l'absorption et le captage par les macrophages dans la paroi intestinale où ils sont activés et digérés vers les ganglions lymphatiques et la moelle osseuse. Postérieurement, les bêta-glucanes sont liés à des récepteurs spécifiques des cellules immunitaires (neutrophiles et éosinophiles) pour les activer.
Individuellement, le bicarbonate potassique évite que les bêta-glucanes soient métabolisés comme des sucres simples et contribue à la régulation des niveaux de sodium-potassium à l'intérieur et à l'extérieure de cellules, c'est à dire, au maintient du pH sanguin (équilibre acide-base).
Outre ces deux éléments, la formule doit contenir une teneur élevée en polyphénols (extrait d'Olea europea) et resvératrol (extrait de Vitis vinifera), ce qui ajoute de la valeur antioxydante à la prise des extraits et favorise l'accès des bêta-glucanes aux récepteurs cellulaires.
Aurélie Brunet, Naturopathe-Nutritionniste à Aix-les-Bains (73)
Le 24 juillet 2022