La sérotonine et le millepertuis


La médecine moderne a investigué la "mélancolie" en recherchant dans le fonctionnement du cerveau ce qui différencie un patient dépressif d'un autre. La neurochimie a permis la découverte de la sérotonine et de son activité.

 

Ce neuromédiateur est un messager chimique entre deux cellules nerveuses, sécrété par l'une pour induire une réponse de la suivante. Cette sérotonine agit au niveau du cerveau en stimulant l'humeur, en amenant la satiété et en soulageant la douleur. On s'est rendu compte que ce neuromédiateur est déficient chez le sujet dépressif, soit parce qu'il n'en produit pas suffisamment, soit parce qu'il n'est pas assez actif. En effet, chez certains sujets, il y a plus de récepteurs que de neuromédiateurs produits. Cette approche a aussi permis d'élucider le mécanisme d'action de certaines plantes pour le traitement des troubles de l'humeurs.

 

La plus célèbre d'entre elles est le millepertuis (Hypericum perforatum), tant par son efficacité que par les polémiques qu'il a suscitées. Son mécanisme consiste à empêcher la sérotonine d'être réabsorbée. Celle-ci reste plus longtemps en contact avec la cellule à stimuler et sa concentration est augmentée. On parle en pharmacologie d'un inhibiteur de recapture de la sérotonine, ou IRS. Le même mécanisme d'action des antidépresseurs modernes ! Mais l'activité du mille pertuis se renforce d'une action anxiolytique, en synergie avec ses capacités à stimuler l'humeur. Ce qui le rend tout indiqué pour les dépressions légères ou modérées, concurrençant ainsi les médicaments, avec les effets secondaires en moins.

 

Est-ce cette concurrence directe qui a déclenché dans les années 2000 une salve de critiques présentant le millepertuis comme dangereux ? La progression de ce remède naturel qui en venait à concurrencer des médicaments stars comme le Deroxat ou le Prozac a été freinée. En fait, les études à l'origine du mouvement anti-millepertuis n'avaient fait que cerner les précautions d'emploi. D'ailleurs, l'industrie pharmaceutique propose depuis des médicaments à base de millepertuis (le Mildac, par exemple) !

 

Voici ce qu'il faut savoir avant d'avoir recours au millepertuis plante : il ne doit pas être associé aux antidépresseurs car il agit sur le même mécanisme. En les prenant simultanément, on va majorer les effets secondaires des médicaments, au risque de les rendre toxiques. Par ailleurs, le millepertuis stimule la dégradation de certains médicaments par le foie, diminuant leur efficacité. A contrario, si on l'arrête, le dosage des médicaments peut devenir excessif. Quand on suit un traitement allopathique quel qu'il soit, il ne faut donc pas entamer ou arrêter un traitement avec du millepertuis sans avis médical. Ceci est particulièrement vrai pour les traitements difficiles à doser, comme les fluidifiants du sang ou les antiépileptiques. Le millepertuis est aussi photosensibilisant, même si l'effet est plus rare par voie interne. Bon à savoir, il pourrait diminuer l'activité de la pilule contraceptive. Cette liste de mise en garde vous paraît longue ? Faites la comparaison avec celle d'un antidépresseur classique !


Trois plantes en affinité avec la sérotonine

Action sur le système nerveux : le Safran (Crocus sativus)

Surtout connu comme épice, il est employé depuis quelques années comme antidépresseur pour son efficacité reconnue dans les dépressions légères à modérées. Les stigmates de ce petit crocus d'automne sont déployés depuis longtemps en médecine (vertus apéritives, réchauffantes et sédatives). Son action est assez proche de celle du millepertuis. Il agit lui aussi sur la recapture de la sérotonine au niveau central mais aussi au niveau du système nerveux périphérique. De plus, il augmente le tonus général de l'organisme en agissant sur la noradrénaline. La dose efficace est faible (30 mg) mais peut être augmentée. A trop forte dose cependant, le safran provoque nausée, vomissement et une forme d'ivresse.

 

La Passiflore (Passiflora incarnata) fait baisser l'anxiété

La passiflore est connue pour ses propriétés calmante et sédative. Elle diminue l'anxiété, calme les palpitations et permet un sommeil réparateur et sans réveil. Son action est proche des benzodiazépines (anxiolytiques type Lexomil) mais elle stimule aussi la sérotonine et évite sa dégradation.

 

Le Griffonia (Griffonia simplicifolia), un précurseur de la sérotonine

Le Griffonia simplicifolia est une plante africaine dont les graines contiennent un acide aminé rare, le 5 HTP. Celui-ci se transforme lors du passage de la barrière hémato-encéphalique en sérotonine. Ce mécanisme est intéressant car la sérotonine est détruite dans l'estomac, contrairement à ce précurseur qui est absorbé par le corps. Le griffonia agit aussi sur la satiété et évite la boulimie associée à certains états dépressifs.