Du nouveau du côté des superaliments ...    un champignon et une lentille d'eau tiennent le haut du pavé

Les fruits et les légumes du commerce tendent à s'appauvrir en nutriments, surtout lorsqu'ils ne sont pas issus d'une filière biologique. Par bonheur, quelques superaliments, délicieux et faciles à intégrer dans les plats au quotidien, peuvent pallier ces déficits. Vous connaissez déjà l'ortie en poudre, les graines de lin moulues, celles de chanvre décortiquées, les graines germées d'alfalfa, la spiruline en paillettes, la pulpe de baie d'açaï congelé ou encore le pollen. Ces superaliments sont renommés pour leurs nombreux bienfaits santé : antioxydants, anti-inflammatoires, immunostimulants, antiallergiques, antimicrobiens, détoxifiants, digestifs, régulateurs de la glycémie et de l'excès de cholestérol, .... Attention toutefois à leur provenance, ainsi qu'aux procédés de transformation et de stockage qui peuvent nuire à leur qualité. Le séchage à très haute température de la spiruline, par exemple, dégrade les ressources naturelles de l'algue. Congelé immédiatement après la récolte, le pollen d'arbustes et de fleurs se révèle, lui, bien plus intéressant sur le plan nutritionnel que le même pollen conservé sans ce procédé.


Chaga, le champignon roi

Le Chaga (Inonotus obliquus) est un champignon qui pousse principalement sur l'écorce des bouleaux et des merisiers. Il se plaît dans des endroit reculés du Grand Nord, dans des régions froides comme la Sibérie, le nord du Canada, l'Alaska, mais également dans certaines parties du Japon ou de la Chine. De façon générale, ce champignon se développe mieux sous des températures basses. En France, il semble s'accommoder du climat du climat continental de l'Auvergne.

 

Le Chaga entretient une relation symbiotique avec les bouleaux dont il est aussi le parasite. Il se nourrit directement de l'arbre dont il tire les nutriments afin d'augmenter sa masse de mycélium. Sa forme, qui rappelle d'ailleurs celle du bois carbonisé, ne fait qu'un bloc. En effet, le Chaga ne possède ni chapeau ni pied. Cette structure fait qu'il pousse lentement à l'état sauvage (10 cm en dix-quinze ans de croissance) et qu'il est très difficile à cultiver. Il est donc important de le ramasser ou de le cueillir avec une grande précaution. Ainsi, il est d'usage de laisser près de 30% du champignon sur le bouleau afin qu'i puisse se régénérer.

 

Champignon connu et utilisé depuis longtemps en Sibérie, dans les pays du nord de l'Europe et en Asie pour ses propriétés adaptogènes, le Chaga conquiert la planète avec son pouvoir antioxydant et son potentiel anticancéreux notamment.

Riche en vitamines B, D et K, ce champignon est aussi une excellente source de flavonoïdes, de polyphénols et de polysaccharides (des glucides complexes constitué d'un grand nombre de sucres simples). Cette armada d'antioxydants lui confère une fonction anti-âge qui neutralise les radicaux libres responsables du vieillissement des cellules et des tissus. Des études trouvent même à celui que l'on nomme le "roi des plantes" des vertus immunostimulantes, anti-inflammatoires, antibactériennes, antivirales et neuroprotectrices contre le développement des maladies neurodégénératives.

 

En outre, le Chaga reste un champignon assez capricieux, car pour profiter pleinement de ses nutriments (vitamine B, D, mais aussi zinc, sélénium, polyphénols, ...) et de ses multiples vertus (immunostimulant, antioxydant, anticancéreux), il faut soit procéder  à une décoction, soit le consommer sous forme de complément alimentaire. Un certain nombre de ces compléments ajoutent différentes substances, comme la vitamine C, à la poudre de Chaga afin d'augmenter la biodisponibilité de ses molécules actives.


Les superpouvoirs nutritionnels de la lentille d'eau Mankai

La lentille Mankai (Wolffia globosa) suscite un engouement mondial. Cette microplante aquatique est d'ailleurs régulièrement en rupture de stock sur les sites français d'achat en ligne. E pour cause : de récentes études soulignent ses bénéfices sur le cerveau et sur les problèmes d'accumulation de graisse dans le foie, appelée également "stéatose hépatique".

Wolffia globosa est la nouvelle coqueluche des chercheurs israéliens. Depuis 2017, plusieurs de leurs études ont fait état des vertus santé de ces minuscules lentilles d'eau Mankai. Ces microplantes aquatiques (chacune mesure moins d'un millimètre !) de la famille des lemnaceae poussent sans racine ni radicule à la surface des eaux douces de l'Inde jusqu'aux Philippines et ont été importées aux Etats-Unis. La France vient, quant à elle de découvrir pour la première fois sur son sol trois nouvelles populations de Wolffia globosa près du lac du Salagou dans l'Hérault. Ces lentilles d'eau étaient jusque-là surtout consommées en Asie du Sud-Est sous forme de boulettes végétales. Mais la publication des études vantant leurs mérites a engendré un réel engouement pour ces plantes au niveau mondial. Les chercheurs de l'université Ben-Gourion du Néguev ont en effet mis en avant leur teneur élevée en protéine (45% de sa matière sèche), avec un profil protéique comparable à celui de l'œufLa Wolffia globosa s'avère aussi très riches en polyphénols (acides phénoliques et flavonoïdes) et contiennent des fibres alimentaires, des minéraux (fer et zinc), de la vitamine A, ... Fait beaucoup plus rare, les travaux révèlent que les Mankai seraient l'une des seules sources végétales de vitamines B12.

 

Booster le régime méditerranéen

 

Considérées comme un superaliment, ces lentilles d'eau ont fait l'objet d'un premier essai clinique l'année dernière : les chercheurs les ont ajoutées au fameux régime méditerranéen, déjà connu pour lutter contre les maladies cardiovasculaires et favoriser la perte de poids. Pendant 18 mois, 294 personnes en situation d'obésité moyenne ont été divisées en trois groupes : le premier a suivi un régime normal fidèle aux recommandations nutritionnelles standard, le second a suivi un régime méditerranéen (MED) classique et le troisième a suivi un régime méditerranéen "vert" supplémenté en thé vert et en lentilles Mankai (100 grammes par jour) prises sous forme de boisson. Et les résultats sont indéniables : les participants soumis au MED "vert" ont perdu plus en poids et en tour de taille (moins 3,7 kg et moins 6,1 cm) que les autres, et surtout, leur graisse intrahépatique a fondu de 39% contre 20% pour le groupe MED classique et seulement 12,2% pour ceux ayant suivi le régime nutritionnel standard. Selon les auteurs de l'étude, c'est la teneur élevée en polyphénols des lentilles Mankai et dans une moindre mesure, du thé vert qui a, en quelque sorte, boosté les effets du régime méditerranéen. Et les découvertes ne s'arrêtent pas là puisque les chercheurs israéliens ont publié en mai 2022 une nouvelle étude que les polyphénols de ce régime méditerranéen "vert" pouvaient également ralentir l'atrophie cérébrale liée à l'âge.

 

Des producteurs en Israël

 

 

Il n'est pas étonnant alors que tout le monde s'arrache ces microplantes, ... Voilà quelques années déjà que la start-up israélienne Hinoman, flairant la bonne affaire, a développé la production de lentilles Mankai en milieu clos et sans pesticides. Les Japonais se sont d'ailleurs empressés de conclure avec eux un partenariat exclusif pour vendre des sticks de Mankai à dissoudre dans la nourriture - ces lentilles d'eau n'ont, semble-t-il, ni goût ni odeur. De plus, elles sont plutôt écologiques : leur culture est possible en hydroponie et nécessite peu d'eau par rapport à d'autres protéines végétales comme le soja. Dommage qu'en France on n'ait pas encore beaucoup de choix pour s'en procurer et quand c'est possible à des prix plutôt élevés. Mais d'autres aliments bien présents chez nous sont tout aussi riches en polyphénols : artichaut, persilchoux de Bruxelles, spiruline, fraises, litchi ou raisin, ...  Un régime méditerranéen multicolore en somme !

 


Aurélie Brunet, Naturopathe-Nutritionniste à Aix-les-Bains (73)

Le 16 Novembre 2022